Aboubakr Jamaï, néocolonialiste malgré lui
De // NaBae 24
Aboubakr Jamaï, panégyriste zélé du pouvoir français ou détracteur furieux des institutions marocaines ? Il n’est pas homme à se contraindre et garde de longs ménagements quand la police française traque des journalistes, il a trop de fiel sur le cœur quand des individus condamnés pour viol sont incarcérés. Tentative de compréhension.
Aboubakr Jamaï ne rend pas service à la vérité. Pire, il ne se pique pas plus d’exactitude que d’impartialité et ne résiste plus dès qu’il s’agit de M. Abdellatif Hammouchi, le directeur général du pôle sécuritaire englobant la direction générale de la surveillance du territoire (DGST) et la direction générale de la sûreté nationale (DGSN). Dans un article fourre-tout consacré à la brouille entre le Maroc et la France (Le Monde diplomatique, octobre 2023), il écrit, parce qu’il faut le citer, que M. Hammouchi, «en déplacement à Paris [en 2014], il est surpris par la visite d’officiers de la police judiciaire venus lui remettre une convocation à comparaître devant le juge.»
Dans les faits, M. Hammouchi était au Maroc au moment de ce chaos institutionnel qui a embarrassé la France plus que tout. Contre les bruits faux et les témoignages légers, Paris a fini par rattraper le coup : Abdellatif Hammouchi a été fait officier de la Légion d’honneur, deuxième distinction française d’envergure qu’il reçoit.
Pourquoi Jamaï, dispensateur suprême des brevets de bonne conduite, sort ainsi de l’obscurité cet événement vieux de dix ans ? Comme d’autres, Jamaï est devenu un prosélyte néocolonialiste de la politique africaine française. Paris n’a pas digéré le fait que le Maroc ait accepté les offres de quatre pays d’envoyer des équipes de recherche et sauvetage: l’Espagne, la Grande-Bretagne, le Qatar et les Émirats arabes unis pour gérer les conséquences du séisme le plus puissant à avoir jamais été mesuré dans le pays.
Le ton généralement frondeur du papier, ses commentaires légers, son hardiesse médisante, l’audace avec laquelle il prétend dévoiler les secrets des cours, enfin, et surtout, son hostilité habituelle contre le Maroc, voilà les raisons qui confirment que le papier de Jamaï s’inscrit dans la continuité des productions qui s’étaient relâchées de leur rigueur déontologique, au point d’en être venues à faire bon marché de la réalité sur le terrain, l’exemple de la une scandaleuse et trompeuse de Libération est encore présent dans les esprits.
L’Algérie citée…une seule fois, le Sahara traité superficiellement
Au fond, l’article de Jamaï n’est qu’une simple compilation et une copie servile de quelques papiers qui l’auront précédé. Il échoue, toutefois, à suppléer aux omissions qui leur seront échappées. Citant étrangement une seule fois l’Algérie, Jamaï se plaint «du traitement différencié que le Maroc réserve à la France d’un côté, aux États-Unis et à l’Espagne de l’autre». Néanmoins, Jamaï, qui feint d’oublier que la France, allié historique du Maroc, se contente d’être favorable au principe d’autonomie tout en utilisant l’affaire du Sahara dans des questions plus larges de géopolitique internationale, de manière inacceptable. La France et les États-Unis sont tous deux membres du Conseil de sécurité de l’ONU, chargé de la résolution du conflit. Si Washington a reconnu officiellement la souveraineté du Maroc sur le territoire, Paris tergiverse encore, soucieux de ne pas mécontenter l’autocratie algérienne. Ce paradoxe paraît peu important aux yeux de Jamaï.
Ce dernier, homme bon à tout faire et à tout dire, aventurier de la politique pour les nuls, homme à qui le hasard et les circonstances improvisent des vocations, réclame à grands cris un Maroc démocratisé et éclate avec fureur au moment où l’on ose faire mine de discuter ses contradictions. Au final, il n’est qu’un pion dans ces cabales déshonorantes pour leurs auteurs contre le royaume.
Ayant inutilement tenté de se faire intégrer sur le tableau des voix audibles, Jamaï se dédommage du peu d’influence qu’il a sur les grands événements politiques par la volonté d’en expliquer les causes comme il lui plaît, c’est-à-dire en multipliant ces compilations sans fin de fables presque toujours hasardées et souvent fausses, de jugements précipités et souvent infidèles. Le cas Jamaï démontre une nouvelle fois que le courant antimarocain se naturalise en France mais aussi un autre phénomène étonnant : la presse française devenue soumise à l’autorité de la police, plus accoutumée à se voir sacrifiée à l’ordre général; là une prudence lâche, on se rend compte que la boutique ambulante de sieur Jamaï et de ses acolytes se contente d’un silence coupable. Arianne Lavrilleux n’est pas aussi lucrative que Omar Radi.